Bird Box.

Auteur : Josh Malerman
Editeur : calmann-lévy, Orbit
Parution : Septembre 2014
Pages : 384

RESUME :

La plupart des gens n'ont pas voulu y croire.
Les incidents se passaient loin, sans témoins.
Mais bientôt, la menace s'est rapprochée, a touché les voisins.
Ensuite, Internet a cessé de fonctionner.
La télévision et la radio se sont tues.
Les téléphones ne sonnaient plus.
Certains, barricadés derrière leurs portes et leurs fenêtres,
espéraient pouvoir y échapper.

Depuis qu'ils sont nés, les enfants de Malorie n'ont jamais vu le ciel. Elle les a élevés seule, à l'abri du danger qui s'est abattu sur le monde. Elle a perdu des proches, a assisté à leur fin cruelle. On dit qu'un simple coup d'oeil suffit pour perdre la raison, être pris d'une pulsion meurtrière et retourner sa violence contre soi. Elle sait que bientôt les murs de la maison ne pourront plus protéger son petit garçon et sa petite fille. Alors, les yeux bandés, tous trois vont affronter l'extérieur, et entamer un voyage terrifiant sur le fleuve, tentative désespérée pour rejoindre une colonie de rescapés. Arriveront-ils à bon port, guidés par leur seule ouïe et leur instinct ?

En ne décrivant jamais ces créatures mortifères, Josh Malerman joue sur nos peurs les plus profondes et se classe, dans ce premier roman aux droits achetés par le cinéma, parmi les tout nouveaux maîtres du thriller.

CHRONIQUE :

"Voilà comment tous trois vivent leur existence. Ils ne sortent jamais très longtemps. Et toujours les yeux bandés.
Les enfants n'ont jamais vu le monde en dehors de leur maison. Pas même par les fenêtres. Pour Malorie, ça fait quatre ans."

Lorsque j'ai lu la 4°, j'ai été immédiatement attirée par cette histoire. Originale. Apparemment angoissante. Et surtout, je me suis dis : comment peut-on raconter une histoire où les personnages ne voient quasiment jamais? En effet, à bien y réfléchir, la vue est le sens dont on se sert le plus pour découvrir ce qui nous entoure. N'est-ce pas ? Preuve en est toutes les descriptions faites dans les romans : l'auteur décrit en premier lieu ce que les personnages voient : un lieu, une personne, des formes, des couleurs... Alors comment diable allait se débrouiller l'auteur pour décrire des scènes sans la vue ? Etait-ce possible de le faire de manière captivante? Eh bien, après lecture de ce magnifique one shot, la réponse est oui, sans aucun doute possible. Car non seulement Josh Malerman réussit à merveilles à se servir des autres sens pour nous décrire les scènes (lorsqu'ils ont les yeux bandés, les personnages se servent en premier lieu de leur ouïe mais aussi de l'odorat et du toucher pour appréhender leur environnement), mais en plus il utilise ce soi-disant handicap pour insuffler une angoisse terrible dans son livre.

"Qu'est ce que tu redoutes de voir? lui demande-t-elle.
_Personne ne connaît la réponse à cette question."

En effet, le toucher et l'ouïe sont trompeurs, et au vu de la situation délicate dans laquelle les gens se trouvent (la quatrième de couverture vous apporte assez d'élément sur le fil de l'histoire), ils deviennent facilement paranoïaques. La peur de l'inconnu. Une des grandes peurs intemporelle de l'homme, n'a jamais eu autant sa place qu'ici... L'angoisse de deviner ce que l'on touche du bout des doigts... peut-être un objet insignifiant, mais peut-être du sang, un cadavre, ou...

L'angoisse rythme ce livre à la perfection, tantôt plus présente pour les parties se passant maintenant, qui racontent la fuite de Malorie et de ses enfants, tantôt légèrement plus effacée quand nous plongeons dans les souvenirs de la jeunes femme. Souvenirs qui racontent comment tout a commencé. Et comment elle en est arrivée là, seule, en fuite, avec ses enfants à qui elle n'a jamais osé donner de nom, ce genre de futilités n'ayant plus de place dans sa vie.
L'auteur décrit les scènes, et raconte son histoire avec brio et talent, alternant présent et passé au moyen de chapitres courts et rythmés, toujours empreints de suspens. Une plume tenue par une main de maître. La présence d'autres protagonistes et donc d'interactions et de dialogues contribuent à rendre les chapitres "passé" légèrement moins oppressants. Légèrement. Mais plus sanglants... Et ceux aux présents regorgent de peur, de folie et de désespoir. Il faut écouter. En silence. Toujours. Un dosage des émotions subtil et réussi.

Je tiens aussi à écrire quelques lignes sur les personnages que l'on côtoient. Ici, l'ensemble de la population est tourmentée, tout le monde ayant perdu au minimum un proche dans des circonstances horribles. On rencontre des personnages vraiment humains, luttant simplement pour survivre, oscillant entre peur et solidarité. Malorie en est un exemple flagrant. La jeune mère est hantée. Hantée par de mauvais souvenirs. Hantée par la peur. Pour elle mais surtout pour ses enfants. L'auteur nous fait entrer dans son esprit, et l'on voit que toutes les épreuves traversées l'ont conduite au désespoir, à flirter avec les frontières de la folie. D'autant que personne, ni personnages, ni lecteurs, ne sait quoique ce soit de ces créatures. Ce qui rajoute à la peur primaire que chacun ressent.

En effet, l'auteur nous fait accepter la présence de ces créatures, mais personne ne peut en dire grand chose. Les seuls les ayant vues n'étant plus là pour témoigner. Beaucoup de faits étranges parsèment l'histoire, ces bruits inquiétants, ces souffles d'air près des visages, ces phases d'hystérie chez des personnages au bout du rouleau, ou même cette personne étrange qu'est Gary...
Au début du roman, on fait la connaissance de Malorie, directement en train de fuir avec ses enfants. On ne sait pas ce qui a provoqué cette fuite. Beaucoup de questions se posent de manière intelligentes au cours de la lecture, mais chacune d'entre elle trouvera sa réponse avant la dernière ligne.

Un one shot époustouflant, addictif, un véritable page-turner rempli d'originalité qui est pour moi un coup de coeur. Et pour l'auteur, un coup de maître.

"C'est la terre tout entière qui est devenue une prison, tout aussi confinée que les oiseaux dans leur cage dehors."

Trailer :