Boys Out !
Auteur : Rawia Arroum
Editeur : Hachette Black Moon
Parution : Octobre 2014
Pages : 320
RESUME :
Depuis l'Éradication, le monde est gouverné par les femmes et pour les femmes uniquement. Les hommes n'ont plus le droit de cité. Tous sont bannis, ou bien traqués et placés en détention pour assurer leur seule fonction : la reproduction. Ensuite, systématiquement, ils sont éliminés. Comme toutes les jeunes filles de son âge, Lyra s'entraîne dur pour être capable d'affronter et de maîtriser les mâles qui rôdent encore. Jusqu'au jour où elle doit rencontrer un homme pour procréer à son tour…
CHRONIQUE :
(22 février 2015)
Un parasite vit aux dépens d'un être ou d'une chose sans y avoir été invité.
Un virus détruit le bon fonctionnement d'un être ou d'une chose, se propageant sans contrôle.
Un surplus impose une présente non désirée.
Parasite, virus, surplus : telle est la définition vraie de l'"Homme".
La seconde sélection des tremplins Blackmoon a fait parler de lui. Et pour cause : il faut avouer que le sujet traité est original ! Une dystopie où les femmes règnent en maître et où les hommes ne sont réduits qu'à l'état de détritus... Et ne servent qu'à la procréation.
L'écriture de Rawia Arroum est réellement percutante. Sa plume propage les messages et la façon de penser de la communauté avec une force incroyable. Elle sait mettre la puissance des mots au service de son idée. Lorsque les femmes parlent des hommes, et notamment lorsque Lyra, notre personnage principal, en parle, les hommes sont associés à des mots tels que ordures, déchets, horreur, abomination, dégoût, détritus... Comme dans toute dystopie qui se respecte, l'endoctrinement est poussé et la haine de Lyra envers la gent masculine lui vient des tripes, sans raison personnelle, que par apprentissage d'une histoire manipulée.
"Il n'y a pas un rat dans les rues.
Mais il y a un homme.
Je jubile intérieurement, je m'impatiente. Une puissante excitation, que je tente de canaliser au mieux, gagne mon corps. Je le vois avancer précipitamment sous le couvert des arbres, jetant régulièrement des regards inquiets par-dessus son épaule. on dirait un chiot abandonné. Une moisissure oubliée dans le coin d'un meuble. Ses bras, maigres et nus, sont plaqués contre un torse couvert d'un simple tee-shirt qui a dû être blanc dans une autre vie. [...] Si pathétique ! Si faible. Il porte des vêtements interdits, il a une silhouette interdite. Lui-même est interdit."
Pourtant le jour de ses 18 ans, Lyra va devoir approcher la créature honnie car elle est en âge de procréer. Enfermée de force dans une cellule avec un homme, elle va apprendre à le connaître, et surtout, reconnaître que cet être est plus proche de l'humain que de la bête. Et lorsque sa grossesse viendra s'en mêler, la façon de voir les choses de Lyra va fortement évoluer.
D'une manière générale je ne me suis pas réellement attachée aux personnages, sauf à Yas, la meilleure amie de Lyra. L'évolution de Lyra n'est pas crédible. Alors qu'on lui a lavé le cerveau et implanté des idées préconçues pendant les 18 premières années de sa vie, il lui suffira de quelques brèves rencontres pour qu'elle mette sa vie en danger pour un homme qu'elle croit aimer sans le connaître.
Même chose pour Loan. Loan est le destiné de Lyra. Rebelle capturé et enfermé en cellule, il est voué à mettre Lyra enceinte, suite à quoi il sera exécuté. Mais au lieu d'être révolté par la situation dans laquelle il se trouve, il se montre d'une affabilité et d'une gentillesse gavante avec cette jeune femme qu'il ne connaît pas . Alors certes, sa vie fait qu'il sait des choses pouvant le faire penser différemment. Certes Lyra se sent plus terrorisée que lui...mais tout de même. J'aurais accepté que la situation évolue dans ce sens si tout n'avait pas été précipité...
Car la précipitation et le manque de profondeur est le gros problème de ce livre. L'idée de base est originale et géniale mais l'auteure ne prend pas le temps de nous faire découvrir son univers. J'aurais aimé mieux connaître le quotidien des femmes, leur vie au Camp, etc afin de vraiment percuter l'endoctrinement dont elles font preuve, ainsi que leurs compétences. Mais là, les bases sont jetées et à nous de faire le reste. Parfois cela peut fonctionner, mais ici, pour moi, cela n'aura pas été le cas.... C'est surtout l'amour complètement non crédible et lui aussi précipité entre Lyra et Loan qui m'a le plus agacée. Bref rien n'est crédible ici.
— Tu es un voleur, Loan Milano.
Mon compagnon écarquille les yeux, surpris. Ses expressions sincères sont magnifiques. Mon regard doit pourtant exprimer autre chose que de l'émerveillement, vu comment il me détaille avec incompréhension.
— Mon cœur m'appartenait, tu me l'as pris, dis-je. Mes pensées étaient à moi, tu t'es incrusté dedans sans me le demander. J'avais une vie réglée et tranquille, tu l'as chamboulée. Tu m'as volé mon quotidien. Tu as fouillé dans mon cœur et tu t'y es fait une place entre ma mère et mes sœurs. Tu m'as rendue dépendante, Loan. Comme droguée à toi, à ta présence."
Comme je disais, Yas est le personnage le mieux réussi même si on a peu de temps pour apprendre à la connaître... Mais c'est une jeune femme forte aux idées arrêtées et qui n'a pas froid aux yeux.
Les autres personnages sont tellement peu exploités que je n'ai rien à en dire.
Quant à la fin .... Ce n'en est pas vraiment une, et ce n'est pas une fin que j'apprécie mais bon c'est le choix de l'auteure. J'avais juste envie de la baffer, ne comprenant aucun de ses choix concernant les différents éléments de la fin. Rappelons qu'il s'agit d'un one-shot et qu'il n'y a pas de suspens ou autre à préserver ...
Bref un livre que j'ai dévoré en quelques heures grâce à l'écriture fantastique et percutante de l'auteure. On avale les pages sans s'en rendre compte et je suivrai ses prochaines publications avec plaisir. En revanche cette lecture reste en demi-teinte pour moi, entre satisfaction pour ce sujet original et les premières pages prometteuses et déception sur la mauvaise exploitation et la précipitation des événements et personnalités.
Dans les livres, rien n'est interdit. Dans les livres que je lis, il y a des femmes. Il y a des hommes, des familles, des mariages. Il y a une harmonie, un apaisement que je retrouve seulement quand je me plonge dans un livre. Quand je lis, j'oublie que je suis un homme traqué. J'oublie que je n'ai pas droit à l'amour, à un futur. J'oublie que je suis destiné à mourir.