Elia, La Passeuse d'Ames, Tome 1.

Auteur : Marie Vareille
Editeur : Pocket Jeunesse

Parution : Mai 2016
Pages : 320


RESUME :


Les prophéties n’existent que si quelqu’un a suffisamment de courage pour les réaliser.

Elia est une Passeuse d’Âmes, un être sans émotions. Elle doit exécuter ceux qui sont devenus des poids pour la société : vieux, malades, opposants… Mais un jour elle ne parvient plus à obéir aux ordres et s’enfuit dans la région la plus déshéritée du pays, là où les Passeurs d’Âmes sont considérés comme les pires ennemis. Au plus profond d’immenses mines à ciel ouvert, Elia découvrira, telle une pépite, une destinée qui la dépasse.
              

CHRONIQUE :

(25 juillet 2016)


C'est avec Elia la Passeuse d'Âmes que j'ai fait connaissance avec l'écriture de Marie Vareille. Je ressors totalement conquise de ma lecture.

Je commencerai cette chronique avec un mot sur la superbe couverture signée Alexandre Chaudret. Elia est représentée telle que je me l'imagine selon les descriptions de l'auteur (avec les cheveux plus ou moins longs). Je trouve le visuel particulièrement réussi et espère une suite aussi belle.

Concernant le nombre de tomes, je me suis posé la question en début de lecture, et ne voyant la mention "tome 1" écrite nulle part, pas même à l'intérieur, j'avais conclu à un one shot. Mais au fur et à mesure, il est vite apparu que l'univers était trop riche et l'intrigue trop complexe pour tenir en 1 seul volume. Je n'ai rien contre les séries (sauf à rallonge) mais ce serait vraiment top qu'on sache dans quoi on se lance sans avoir à aller fouiner sur internet ! Donc, je suis allée sur le site de Marie Vareille pour essayer d'en apprendre plus. Concernant le nombre de tomes j'ai fait chou blanc, mais la lecture de quelques articles à confirmé tout son talent d'écrivain et son humour décapant. Au final, je suis ressortie de là sans savoir combien de tomes composeraient les aventures d'Elia mais avec la certitude de lire les deux autres romans de l'auteur, radicalement différents de celui-ci puisqu'il s'agit de Chick-Lit. Par contre, pour celles et ceux qui connaissent ces romans, à noter que l'humour n'est pas une caractéristique de La Passeuse d'Âmes.

Bref, pour revenir un peu au sujet qui nous occupe, La Passeuse d'Âmes est une dystopie, avec tous les éléments communs que l'on y retrouve souvent : la destruction de notre monde (par une guerre qui durera pas moins de cent ans), une poignée de survivants, un climat déchaîné, et un seul continent qui ne sera pas noyé sous les flots. 

Sur ces cendres renaîtra une civilisation totalitaire, séparée en différentes castes à la hiérarchie stricte. Donc comme vous le voyez, les bases de l'univers sont assez caractéristiques du genre. A noter que parfois, l'ambiance m'emmenait un peu plus vers un sentiment de Fantasy. Très réussi.

"Règle 1 : les êtres humains ne naissent pas libres et égaux en dignité et en droit. Chacun a pour devoir envers la Communauté de respecter sans la questionner la place qui lui est attribuée en fonction de sa naissance."

Mais de ces bases sont nées un univers riche, complexe et à l'engrenage bien huilé. J'ai adoré l'originalité qui en découle, avec la Cité du Palatium, les Défenseurs et les Mines de Phosnium. On voit que Marie Vareille a vraiment accompli un gros travail sur son univers, dont elle n'a omis aucun aspect.

L'écriture très visuelle permet de se faire une idée assez précise des lieux, et la plupart des débuts de chapitres nous offrent un paragraphe présentant des extraits de textes officiels nous permettant de comprendre la structure et le fonctionnement de cette société. Une façon efficace est sympathique d'en apprendre plus. 

C'est au coeur de la cité que l'on va faire la connaissance d'Elia, une kornésienne (la caste des élites), jeune fille de 16 ans, solitaire, avec deux particularités : elle ne peut pas se permettre de montrer ses cheveux et c'est une Passeuse d'Âmes. Elle est chargée de donner la mort aux gens qui ont fini de contribuer à la communauté, et aux malades. Censée être dépourvue d'émotions, rejetée par les uns, terrifiant les autres, Elia est pourtant loin d'être une psychopathe sans coeur. Je tiens à noter que son état de Passeuse d'Âmes devient juste anecdotique, un moyen de faire d'Elia une jeune fille à part, car à aucun moment elle n'apparaît froide et sans coeur et on ne la voit exercer son métier que très peu de temps. 

Dans cette cité où la communauté prime sur la liberté, où l'individu en tant que tel n'a pas d'existence, dévier un tant soit peu du chemin tout tracé pour vous est passible de mort. Ainsi, un jour où Elia transgressera les ordres, sa vie se verra chamboulée à jamais.

Devenue fugitive, la jeune fille de la caste élite sera contrainte de se réfugier dans les contrées du Nord, où vivent les plus pauvres des Nosobas, les esclaves, qui survivent tant bien que mal en forant jour après jour les mines de Phosnium.

Ce passage d'un personnage d'une caste à une autre se retrouve fréquemment dans les dystopies ou les livres de fantasy, mais il est ici excellemment traité grâce à une plongée passionnante dans une partie de cet univers et à des personnages aux personnalités fouillées.

Elia est une jeune fille attachante et, même si elle vient d'une caste privilégiée, elle a toujours été traitée comme une pestiférée. Petite et fluette, au visage d'ange, elle fait preuve d'une détermination sans faille mais reconnaît aisément devoir sa survie à ses nouveaux (et seuls) amis. J'ai aimé que son personnage soit fort sans être surhumain, déterminé sans être invincible, avec tant de choses à apprendre sur les relations humaines. Elia va apprendre à se battre, pour elle-même, pour sa famille, pour ses amis, mais aussi pour la liberté et l'espoir. Car loin d'imaginer au départ où ses pas la mèneraient, la jeune fille finira par découvrir qu'elle pourrait bien être liée à une étrange prophétie.

"Elia n'avait pas peur, elle pensait que depuis qu'elle était arrivé au Dédale elle avait touché le fond et que la situation ne pouvait pas empirer.
Elle avait tord."


Son personnage évolue beaucoup, et sa sensibilité et son intelligence lui permettront de faire fi de toutes ces idées fausses et préconçues inculquées au fil de son éducation. Pensant avoir affaire à des sauvages sans coeur ni intelligence, elle découvrira que les Nosobas valent pour la plupart bien mieux que certains membres de sa propre famille...

Dans les mines, Elia fera la connaissance de Tim, un garçon qui a sensiblement son âge et qui partagera le peu qu'il possède avec elle afin de lui permettre de survivre. Peu à peu, Elia verra autour d'elle se former une nouvelle famille et de nouveaux amis, parmi lesquelles Arya, une jeune fille étincelante qui apportera de la gaité et de la lumière dans le quotidien sombre et dur des foreurs.

Nous rencontrons aussi Solstan qui est sans conteste le personnage que je préfère. Rebelle dans l'âme, au grand coeur qu'il cache sous une apparente dureté, Sol a lui aussi une personnalité fouillée. Très différent de Tim, il complète le quatuor à la perfection. Je ne veux pas trop en dire sur lui, mais ce qui est sûr, c'est que je suis tombée sous le charme.

A part cela, vous remarquerez que, en effet, Elia a deux garçons en orbite, pourtant, l'auteur nous épargne le triangle amoureux. Certes, l'histoire n'est pas exempt de sentiments, mais elle reste centrée sur l'action. Car oui, le livre nous tient en haleine du début à la fin grâce à une action omniprésente. Pas le temps de souffler deux minutes, Marie Vareille nous entraîne dans un rythme endiablé dans les (mes)aventures d'Elia. Superbe.

Bon si je devais pinailler sur un point, je dirais qu'à un moment, il y a une petite facilité scénaristique dans le sens où Elia rencontrera vraiment LES bonnes personnes qui seront en relation directe avec des gens susceptibles de l'aider... Vu les milliers d'habitants dans les mines, il me semblait peu probable qu'elle tombe par le plus grand des hasards sur ces personnes-là mais bon. Ceci reste un détail au vu de la richesse de tout le reste du roman.

La fin est excellente car elle nous ramène.. au début. En effet, le premier chapitre est à part du reste de l'histoire. On en retient certes une information capitale, mais ensuite, on se concentre sur le reste et l'on en oublie les détails. C'est à une cinquantaine de pages de la fin que j'ai tilté et que je suis repartie relire ce premier chapitre ! Sans ce sursaut, je n'aurais retrouvé le lien qu'à l'avant-dernier chapitre. Tout est vraiment excellemment ficelé. 

Bref, comme le prouve cette chronique extrêmement longue, le premier tome des passeurs d'âmes fût vraiment une excellente lecture, d'un dynamisme fou avec des personnages très travaillés et attachants, le tout dans un univers riche et passionnant. Vivement la suite.


Trailer :