La Passe-Miroir, Tome 2 : Les disparus du Clairdelune.
Auteur : Christelle Dabos
Editeur : Gallimard Jeunesse
Parution : Octobre 2015
Pages : 550
RESUME :
Fraîchement promue vice-conteuse, Ophélie découvre à ses dépens les haines et les complots qui couvent sous les plafonds dorés de la Citacielle. Dans cette situation toujours périlleuse, peut-elle seulement compter sur Thorn, son énigmatique fiancé? Et que signifient les mystérieuses disparitions des personnalités influentes à la cour? Ophélie se retrouve impliquée malgré elle dans une enquête qui l'entraînera au-delà des illusions du Pôle, au coeur d'une redoutable vérité.
CHRONIQUE :
(25 Mars 2016)
Ce deuxième tome de la passe-miroir est en tout point aussi captivant que son frère aîné.
Je ne peux une fois encore que saluer le talent de l'auteur, qui nous offre un univers d'une richesse extraordinaire.
Afin de changer de décor et de nous en mettre toujours plein la vue, une partie de l'intrigue ne se situera plus à la Citacielle mais dans la ville des Sables-d'opale, au bord de la mer (et au bout de l'arche). J'ai encore une fois été soufflée par le caractère visuel de son écriture, qui m'a transportée directement dans le monde d'Ophélie. De plus, l'auteur nous offre une autre vision de son univers, puisque cette partie de l'Arche n'est pas entièrement gouvernée par les illusions... Ophélie peut enfin contempler de véritables paysages, apprécier sentir le vent dans ses cheveux, la pluie sur ses lunettes, voir un ciel gris assombrir le paysage. Elle respire. Simplement. Mais pas pour longtemps puisqu'il semblerait que les ennuis la suivent à la trace.
Son but premier sera d'essayer de survivre jusqu'à son mariage avec l'étrange Thorn. Pourtant, une vague de disparitions au Clairdelune (l'ambassade d'Archibald à la Capitale) va largement lui compliquer la tâche, sans parler du nouvel intérêt que lui portera l'esprit de famille : Farouk.
Histoire de compliquer encore un peu les choses et de nous apporter une touche de couleur et de rocambolesque, la famille de notre liseuse (dont son incroyable et exubérante mère) va débarquer au Pôle, bien décidée à prendre des nouvelles et attendre le mariage sur place.
Évidemment, les 550 pages renferment une masse incroyable de faits, de retournements, de surprises, d'action mais aussi d'humour, d'amitié et de tendresse. Impossible de tout vous détailler, ce qui n'aurait par ailleurs aucun intérêt. Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il ne faut pas avoir peur du côté "pavé" de ce livre : il se lit, que dis-je, se dévore, à une vitesse phénoménale.
Au niveau des personnages, c'est toujours autant de bonheur de retrouver notre liseuse animiste, toujours aussi maladroite et banale d'apparence. Mais quelle joie de suivre cette intelligence hors norme, cette droiture d'esprit, cette gentillesse profonde, et surtout, cette jeune femme innocente qui se retrouve à enquêter dans un nid de vipères. Ce deuxième tome donne la part belle à son esprit et à ses valeurs, et permet de faire oublier à tous les habitants du pôle que cette jeune fille semble banale. Je visualise précisément son personnage, toujours en train de remonter ses lunettes sur son nez, son écharpe s'entortillant autour d'elle dans des mouvements plus ou moins stressés ou lascifs, répondant à l'humeur de sa maîtresse. Ophélie évolue beaucoup dans ce tome. A force de côtoyer ces gens peu scrupuleux, elle perd de sa naïveté, s'affirme, montre une facette d'elle qu'on ne faisait jusqu'alors qu'effleurer, sans perdre toutes les valeurs qui font d'elle une si belle personne.
Thorn, quant à lui, fait son possible pour s'humaniser. En réalité, il fait tout pour protéger sa future femme, mais ses manières un peu rudes et peu communicatives ont vite fait de porter à confusion. Malgré cela, Ophélie fait l'effort d'essayer de regarder sous la carapace de l'homme bourru. J'aime la façon dont l'auteur gère l'évolution de la relation entre ces deux grands nigauds...
_ Je ne crois ni en la chance ni au destin, déclara-t-il. Je ne me fie qu'à la science des probabilités. J'ai étudié les statistiques mathématiques, les analyses combinatoires, la fonction de masse, les variables aléatoires et elles ne m'ont jamais réservé de surprises. Vous ne semblez pas bien mesurer l'effet déstabilisant que peut produire quelqu'un comme vous sur quelqu'un comme moi.
_ Je ne vous suis pas du tout, balbutia Ophélie en toute sincérité.
Thorn roula les dés dans la paume de sa main, puis les rangea dans sa poche.
_ Je ne peux pas tourner le dos un instant sans que vous vous retrouviez là où vous n'auriez jamais dût être. Je pense que vous avez...comment dire...une prédisposition surnaturelle aux catastrophes.
J'étais ravie de voir la mère d'Ophélie prendre plus d'importance dans ce livre. Sûre d'elle, extravagante et maîtresse femme, elle n'a pas peur d'apostropher l'esprit de famille lui-même afin d'essayer de lui inculquer les bonne manières... Elle apporte dans ce récit une bonne dose d'humour bienvenue.
Je ne m'étendrai pas sur les autres personnages, mais qu'il s'agisse de renard, Mme Hildegarde ou Archiblad, j'apprécie le travail poussé (plus ou moins en fonction de l'importance de ladite personne) effectué sur eux.
Il n'y a pas à dire, cet univers est le genre à pouvoir rivaliser en richesse avec les incontournables du style Harry Potter (bien qu'il n'ait rien à voir, soyons d'accord). Tout est visuel, riche, original et jamais vu, chaque détail ayant son importance. Le côté animiste d'Ophélie et de sa famille permet d'enrichir l'environnement, de lui faire prendre vie... Ainsi, mobilier, lunettes, habits, tout devient personnalisé, voire humanisé... Un véritable ensorcellement. De la magie à chaque coin de meuble, de l'émotion à toutes les pages, des décors à couper le souffle et de sacrées aventures pour notre future mariée bien malgré elle.
Pour résumé, je ferai très court : encore un véritable coup de cœur.
NB : j'apprécie réellement l'arbre généalogique et la carte en début de roman qui nous permettent de nous éclairer sur ce qu'il y a dans la tête de cette génialissime auteur et de mettre de l'ordre dans nos idées.
-Quand je vous ai dit que vous aviez une prédisposition surnaturelle aux catastrophes, ce n'était pas une invitation à me donner raison.